Ironie de
l’histoire / Réda Seddiki
Le
grand magicien des mots et du verbe
Festival
off d’Avignon – 2023
La
comédie d’Avignon / 17h30
Texte :
Réda Seddiki
J’ai
découvert le Stand-up Ironie de l’histoire
écrit et magistralement interprété par Réda Seddiki lors de l’édition 2022 du
festival off d’Avignon. Entre les deux festivals nous nous sommes revus à
Paris. J’y suis retourné cette année. Dans ce spectacle d’humour finement
ciselé Réda se révèle un magicien des mots. Son amour de la littérature et du
langage, son amour des langues (son éloge de la langue algérienne en témoigne),
il l’a emmené avec lui depuis sa terre natale, l’Algérie, jusqu’en France, à
Paris. On entend parler de tranches de vie en Algérie puis en France. Ce
spectacle, largement autobiographique, nous élève par le rire et l’autodérision,
surtout par une belle maîtrise de la langue et beaucoup d’émotion, dans les
vastes domaines de la pensée et de la réflexion. On y parle de bureaucratie, de
frontières, de racisme, de politique, de portes fermées qui pourraient être
ouvertes, de religions, de traditions,
de famille, de littérature et de langue, d’amour, de cuisine (et si on
remplaçait les mots arabe par couscous, italien par pizza etc. ?)
mais surtout de culture. Quelques extraits pour donner le ton du spectacle :
On n’est pas mauvais, c’est juste qu’on se
protège tellement qu’on laisse à personne l’occasion de faire de bonnes choses.
Ce
passage sur les portes fermées (et l’obsession sécuritaire de manière plus
générale) qui « empêchent les inconnus d’entrer chez vous pour y faire une
bonne action » m’a fait penser au magnifique film coréen Locataires de Kim Ki-Duk (2005).
Sur la
relation parents-enfants :
Pendant longtemps c’est les parents qui
apprennent des choses à leurs enfants, puis vient un moment où c’est les
enfants qui apprennent des choses à leurs parents, et c’est ce switch-là qui
fait si la relation est bonne ou pas.
Je dis : Il y a tellement de conflits
géopolitiques qu’il faut mettre la culture au cœur de l’identité. Il ne faut
plus dire son pays mais un élément culturel de son pays. C’est beau la musique,
il n’y a pas de clivage, pas de haine, pas de guerre. Personne ne va bombarder
le Québec pour récupérer Céline Dion.
S’il faut
mettre la culture au cœur de l’identité, c’est bien la culture qui est au cœur de
L’ironie de l’histoire. Le stand-up
de Réda est en effet un hymne à la culture comme moyen exceptionnel de relier
les hommes entre eux par-delà les frontières et les identités nationales. La
culture comme moyen de dialogue, donc de réconciliation, de compréhension
mutuelle et de paix. L’exemple de la musique me fait penser à un groupe
israélien de Metal, Orphaned Land,
qui affirme avec fierté rassembler dans ses concerts Juifs et Palestiniens,
Juifs et Arabes.
Le Figaro
parle de Réda en utilisant la belle métaphore pascalienne du roseau pensant. Oui, le grand Réda a
bien l’allure d’un roseau, et aucun doute à ce sujet, ce roseau est pensant. La
finesse de son humour est mise au service de grandes et belles pensées. Si son
spectacle nous fait rire d’un bout à l’autre, si l’émotion qu’il dégage est
palpable, il a cette grande qualité de nous faire penser. Bref si on ressort
non seulement heureux et comblés par cette magistrale interprétation, on quitte
Réda avec le sentiment d’être moins bêtes (plus intelligents ?), et
surtout plus humains. Ironie de l’histoire
nous apporte en effet un message d’espérance et de paix. L’humour de Réda
est toujours bienveillant et rempli d’amour. A son image…
Aujourd’hui, dans « Ironie de l’histoire »,
je n’ai plus d’opinions, mais des pensées, je ne cherche plus à prendre parti
mais à prendre position, enfin je ne veux plus dénoncer mais démasquer. Faire
tomber ces filtres que les sociétés imposent à chaque individu et explorer de
nouveaux paradigmes de l’humour contemporain. Note d’intention
de l’auteur.
Et si on
se mettait à lire Anatole Algérie, Albert Kamel et Ferdinand Selim ?
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